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21 juillet 2009 2 21 /07 /juillet /2009 10:19
Je me permets de citer ce témoignage reçu d'amis sur place.


"TEMOIGNAGE

Grande Comore, 30 juin 2009, matinée du crash de l’avion de la Yemenia airline.

Un peu avant 2h00 du matin, un ami qui travaille à l’aéroport appelle à la maison pour dire qu’un avion de la Yemenia airline en provenance de la France, via Sanaa (Yemen), n’a pas pu atterrir et a disparu dans le ciel. Un peu plus tard dans la semaine, nous l’avons rencontré, voilà ce qu’il nous a décrit : l’avion a commencé son atterrissage « à vue », en empruntant la mauvaise piste. Il a tenté d’atterrir dans le sens du vent, ce qui est contraire aux règles de sécurité. Au dernier moment, le pilote semble se raviser et essaie de redécoller. Une explosion a alors lieu (les témoins décrivent un grand éclair de lumière), l’avion reprend de l’altitude et se dirige vers le nord (sans doute pour prendre l’autre piste), puis disparaît. Selon cet ami, l’avion a été pris dans les vents tournants du nord et n’a pas pu rétablir son équilibre.

Personne ne sait où se trouve l’avion, mais l’explosion laisse supposer qu’un crash a eu lieu. On a besoin d’aide.  A la maison, Moustoifa, qui est dentiste, rassemble son matériel de secours. Soumette vient me réveiller, m’explique ce qui se passe et me demande si je veux venir. Ma première réponse est négative, je ne veux pas voir ça. Puis je réalise que les moyens de secours aux Comores ne sont pas ceux de la France, il ne s’agit donc pas de voir, mais d’aider, d’apporter du secours, aussi minime soit-il. Je me ravise donc et je pars avec Moustoifa, Soumette, Moeze et Bai. Soumette prend l’appareil  photo pour pouvoir témoigner.

Nous partons immédiatement en direction du nord, il fait nuit. Au loin, sur la mer, nous distinguons une grosse lueur apparemment fixe. D’autres ont vu la même chose et commencent à se rassembler sur la côte. Je ne comprends pas ce qui se dit, les gens parlent comorien, mais je sais que nous nous demandons tous si cette lueur est celle de l’avion et quand les secours arriveront. 

Nous attendons, impuissants.

A l’aube, nous sommes informés que le crash s’est produit selon les estimations dans l’océan à environ 20 km au nord de Mitsamiouli. Nous ne sommes qu’à quelques kilomètres de ce village. Les gens se précipitent alors sur la route en direction du nord.

Des centaines de gens se regroupent sur la plage de Mitsamiouli. 

Là, on attend, le regard tourné vers le nord ; on attend des signes de vie, des secours, quelque chose sur quoi s’appuyer, sur quoi agir, pour cesser d’être inutiles. Des personnes sont en train de mourir à seulement quelques kilomètres de nous, des personnes réelles, pas des « anonymes » derrière l’écran télé : des frères, des sœurs, des mères, des pères...  C’est un petit pays les Comores, toutes les familles sont liées les unes aux autres, les gens se connaissent.

Des secours commencent à se mettre en place, courageusement mais sans grand espoir, les moyens sont tellement dérisoires : une barque, un bateau pneumatique. 

Le pays ne dispose pas de moyens suffisants pour ce type de sauvetage (pas d’hélicoptères, pas de bateaux équipés de radars, pas d’avions de secours) et les secours internationaux tardent… 

La révolte s’installe ici et là  dans les cœurs. La colère est toujours préférable à l’angoisse et au désespoir. Mais c’est une révolte sans objet. Contre qui se révolter ? Peut-on en vouloir à un pays d’être trop pauvre en équipement pour sauver ses citoyens ? Doit-on accuser les secours internationaux qui tardent ? Non. 

Y a rien d’autre à faire que de rester planter là, incrédules devant le désastre.

Le bilan des victimes est lourd : 152 passagers. Une seule survivante. A ce jour, les autres corps n’ont toujours pas été retrouvés. Face à cet impossible deuil, les gens prient, essaient de s’entraider, mais les ressources sont minimes... 

Pour comprendre la gravité de cette catastrophe, il faut savoir qu’au-delà du drame affectif, il y a un drame économique. La plupart des passagers du vol de la Yemenia étaient des soutiens de famille qui revenaient aux Comores pour les vacances. Ces gens se sont exilés de leur île et travaillent en France pour aider leur famille (jusqu’à 4 générations d’âge) à rester dans leur pays et à y vivre dans des conditions acceptables. Le système socio-économique des Comores, fragilisé depuis la décolonisation française, est largement dépendant de la Diaspora comorienne en France. Aujourd’hui, cet équilibre est menacé. Il faut agir rapidement, apporter de l’aide à ces familles, l’aide locale n’est pas suffisante. C’est pourquoi le Secours Populaire fait appel à la générosité internationale. 

J’espère sincèrement que vous y serez sensibles."

Anne Bail-Decaen (île de La Réunion)

 

 

Vous pouvez adresser vos dons à :

Fédération des Bouches-du-Rhône du Secours populaire français 

« URGENCE COMORES »

BP12

46 rue Locarno

13351 Marseille Cedex 05

(Chèque à l’ordre de Secours Populaire)

Contact : Lysia BEYSSELANCE : 04-91-36-56-38

             Zalhata BACARI : 06-60-42-88-01

E-mail : monde@spf13.org

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commentaires

A
Merci Edith d'avoir posté mon témoignage sur cette triste journée. J'espère que l'information circulera, que des dons arriveront...
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